La crème pâtissière fait partie de la grande famille des crèmes desserts, avec la crème anglaise, la crème caramel et la crème brûlée. Elle est rarement mangée telle quelle; on l’utilise davantage pour garnir des choux, des éclairs ou le fond d’une tarte aux fruits. Additionnée de noix de coco ou de tranches de bananes, la crème pâtissière se transforme en garniture de tarte, comme celle des fameuses coconut et banana cream pies, populaires dans les restaurants américains. C’est aussi de la crème pâtissière qui se trouve entre les étages d’un gâteau Boston. Dans tous les cas, ces desserts classiques exigent une garniture qui se tient bien et ne coule pas lorsqu’on les tranche.
Bon à savoir
Dans une recette de crème pâtissière de provenance européenne, on demande de la « maïzena » ? Ne cherchez pas plus loin que votre garde-manger ! Maïzena (en fait, une marque déposée) est le terme utilisé en Europe pour nommer la fécule de maïs.
Les ingrédients
Une crème pâtissière contient toujours du lait, des jaunes d’œufs (ou des œufs entiers), du sucre, de la farine (ou de la fécule de maïs) et de la vanille. Parfois, on y ajoute aussi du beurre après la cuisson, pour enrichir le goût et rendre la crème plus lustrée.
Les oeufs
Les œufs servent à épaissir, mais aussi à donner du goût. Sans les œufs, la crème pâtissière goûterait le lait sucré. Les œufs épaississent la préparation grâce à leurs protéines, de longues molécules enroulées sur elles-mêmes. Durant la cuisson de la crème pâtissière, ces protéines se déroulent et s’attachent les unes aux autres pour former un réseau qui emprisonne une partie du liquide (un processus appelé coagulation).
Doit-on utiliser uniquement des jaunes, des œufs entiers ou une combinaison des deux ? C’est une question de goût. Outre des protéines, les jaunes d’œufs contiennent aussi des matières grasses et de la lécithine (un émulsifiant naturel), qui ajoutent une texture soyeuse et une belle couleur jaune à la crème pâtissière. Les blancs pour leur part, donnent surtout de la fermeté, car ils ne contiennent que des protéines. Dans un cas comme dans l’autre, les protéines des œufs ne suffisent pas seules à la tâche. Il leur faut de l’aide pour assurer la tenue de la crème pâtissière. Ce soutien vient de la farine ou de la fécule de maïs.
La farine ou la fécule de maïs
La farine tout usage et la fécule de maïs contiennent toutes deux de l’amidon. L’amidon est présent dans les petits granules que l’on sent lorsqu’on frotte de la farine ou de la fécule entre les doigts. Durant la cuisson, ces granules s’ouvrent et se gorgent d’eau. De longues molécules d’amidon s’échappent alors des granules et se mélangent au liquide de la recette. Du coup, le lait ne coule plus, car il se trouve piégé à l’intérieur des granules et parmi les molécules d’amidon.
Farine tout usage ou fécule de maïs ? Ici encore, c’est une question de goût, et chaque pâtissier a son opinion sur le sujet. La crème pâtissière préparée uniquement à partir de farine tout usage donne un résultat un peu plus opaque et blanchâtre et a une texture plus ferme et légèrement plus pâteuse que celle préparée avec la fécule de maïs. En revanche, une crème pâtissière faite uniquement avec de la fécule de maïs a une couleur légèrement plus jaune et une texture plus soyeuse en bouche, mais elle peut parfois être un peu gluante. Et si on mélange les deux ? On peut profiter des forces de chacune, en évitant les désagréments, comme dans notre recette ci-contre. Par contre, si vous avez une recette uniquement à base de farine et que vous souhaitez utiliser de la fécule de maïs (ou vice versa), sachez que la fécule remplace la farine en suivant ce ratio : une part de fécule pour deux de farine.
Le lait
Le choix du lait a peu d’importance sur la réussite de la crème pâtissière. Que l’on préfère la version écrémée, le 1 %, le 2 % ou le 3,25 %, la liaison se fera sans problème, autrement dit la crème pâtissière épaissira autant. Par contre, côté saveur, le lait entier ou 2 % donnera de bien meilleurs résultats que l’écrémé. Il est préférable que le lait soit préalablement chauffé : cela permet d’y infuser un élément aromatique (une gousse de vanille, des grains de café, des fleurs de lavande, etc.), de faciliter la dissolution du sucre et de diminuer considérablement le temps de cuisson.
Étonnant!
Notre salive contient de l’amylase, une enzyme conçue pour attaquer et défaire la structure de l’amidon. C’est, en fait, la première étape de la digestion de tous les aliments amylacés. Si, par mégarde, on goûte la crème pâtissière à répétition avec la même cuillère (une pratique évidemment déconseillée sur le plan de l’hygiène), on introduit du même coup de l’amylase à la préparation. Au cours des heures suivantes, l’enzyme pourrait s’attaquer aux molécules d’amidon, les brisant, ce qui rendrait la crème pâtissière liquide.
La préparation
La crème pâtissière est facile à préparer. Notre méthode est de mélanger le sucre et l’épaississant (la farine ou la fécule), afin de bien le disperser dans le sucre, avant d’ajouter les œufs, pour prévenir la formation de grumeaux. On incorpore ensuite le lait chaud, très graduellement en fouettant et en s’assurant de bien délayer les ingrédients dans le lait. Vient ensuite le moment critique : la cuisson sur le feu. C’est ici que des petits problèmes peuvent survenir. Voici trois astuces pour réussir à tout coup.
Fouetter la préparation sans arrêt pendant la cuisson
La crème pâtissière colle facilement au fond de la casserole et a tendance à former des grumeaux. Il est important de fouetter sans arrêt, en s’assurant de bien racler tout le fond de la casserole ainsi que les coins. Si, malgré ces précautions, il se forme quelques grumeaux, pas de panique ! Il suffit de passer la crème au chinois ou au tamis à la fin de la cuisson.
Porter la préparation au point d’ébullition
Sinon, la crème n’épaissira pas autant qu’on le voudrait (voyez notre expérience à la page 34). Très souvent, les recettes indiquent seulement de « cuire jusqu’à épaississement », sans toutefois préciser que la préparation doit bouillir. Or, l’ébullition est importante : elle permet d’assurer la cuisson complète de l’amidon et aussi d’inactiver une enzyme appelée amylase, naturellement présente dans les jaunes d’œufs. Cette enzyme doit être inactivée par la chaleur, sinon, au cours des heures suivant la cuisson, elle pourrait s’attaquer à l’amidon et affaiblir sa structure. Résultat : la crème pâtissière pourrait devenir coulante.
Faire refroidir sans trop remuer
Sinon la crème pâtissière pourrait devenir coulante. En effet, la structure hypergonflée des granules d’amidon est très fragile. Des coups de fouet un peu trop énergiques après la cuisson pourraient les faire « imploser » et rendre la crème pâtissière plus fluide. De plus, pour empêcher qu’une peau se forme à la surface de la crème, on la couvre d’une pellicule plastique ou d’un morceau de papier parchemin beurré, en prenant soin de bien appuyer le papier contre la surface de la crème.
Manque de cuisson
La crème pâtissière a été retirée du feu dès qu’elle a commencé à épaissir avant l’ébullition. La préparation n’a pas assez de tenue pour servir de garniture à tarte.
Cuisson parfaite
Cette crème pâtissière a été portée à ébullition et cuite une minute de plus, pour assurer un gonflement maximal de l’amidon. La préparation se tient parfaitement.
Petit lexique des crèmes desserts
Tous ces desserts classiques sont faits à partir des mêmes ingrédients de base, soit des jaunes d’œufs (ou des œufs entiers), du lait (ou de la crème), du sucre et de la vanille. Qu’est-ce qui distingue la crème pâtissière de ces autres crèmes desserts ? C’est la seule qui contienne une bonne dose de farine ou de fécule de maïs.
La crème anglaise
Une sauce classique pour accompagner les desserts, qui sert aussi à la confection des crèmes glacées. Les ingrédients de base sont cuits sur le feu, en remuant sans arrêt, ce qui permet d’obtenir une sauce légèrement épaissie, uniquement grâce à la coagulation des protéines de l’œuf. Les Anglais l’appellent custard sauce.
La crème caramel
Les ingrédients de base sont mélangés puis versés dans des ramequins contenant du sucre caramélisé. Les ramequins sont cuits au four, dans un récipient rempli d’eau (un bain-marie). La crème devient ferme à la cuisson. Une fois refroidie, elle est démoulée et renversée dans une assiette.
La crème brûlée
Le mélange de base, enrichi de crème à 35 %, est cuit au four dans des ramequins, en utilisant la technique du bain-marie. Une fois refroidie, la crème est recouverte d’une mince couche de sucre que l’on caramélise, à l’aide d’une torche ou au gril, pour former une couche craquante.