Si le lait peut former une mousse fine et soyeuse, ce n'est pas parce qu'il contient des matières grasses, mais bien parce qu'il contient des protéines. Sans protéines, le lait serait comme de l'eau et ne mousserait pas. Lorsqu'on utilise la buse à vapeur d'une cafetière espresso ou encore un moussoir pour faire mousser du lait, on y introduit des millions de petites bulles d'air. Les protéines du lait sont alors déstabilisées par la chaleur (leur structure en balle de laine se déroule) et viennent se coller autour de ces bulles. Elles forment ainsi une enveloppe protectrice qui empêche les bulles d'éclater et de disparaître.
Le lait de vache contient en moyenne 3,2 % de protéines, ce qui est très peu. Voilà pourquoi, d'un type de lait à un autre, la différence dans la teneur en protéines — aussi petite soit-elle — peut faire toute la différence sur la quantité de mousse produite.
Par exemple, si l'on compare la teneur en protéines de différents types de lait de vache (voir notre tableau p. 21), on s'aperçoit que le lait écrémé et le lait partiellement écrémé à 1 % de matières grasses contiennent un peu plus de protéines que le lait entier et le lait à 2 % de matières grasses.
Parfois, la teneur en protéines du lait peut varier légèrement avec la saison. Les laits d'été, par exemple, contiennent un peu moins de protéines que les laits d'hiver, en raison des changements dans l'alimentation des troupeaux. À l'usine de transformation, l'utilisation d'un procédé de filtration (la micro-filtration ou l'ultrafiltration, par exemple) peut réduire légèrement la teneur en protéines comparativement à un lait non filtré, ce qui pourrait expliquer certaines différences observées entre les laits de différentes marques.
Malheureusement, ces petites différences n'apparaissent pas dans les tableaux de valeurs nutritives sur les emballages, puisqu'elles sont minimes et dissimulées par l'arrondissement des chiffres. Elles expliquent par contre pourquoi, d'une fois à l'autre, on n'obtient pas toujours la même qualité ou la même quantité de mousse pour notre café.
Pourquoi le lait refuse-t-il parfois de mousser ?
Même si on utilise toujours le même lait ou toujours la même technique, il arrive parfois que le lait forme une mousse éphémère qui disparaît en quelques secondes. C'est à la fois frustrant et… mystifiant. Que se passe-t-il ? Cela s'expliquerait par la présence d'acides gras libres, de mono et de diglycérides, des composés qui se forment lorsque des enzymes ou des bactéries attaquent les matières grasses du lait : une réaction que l'on appelle « lipolyse ». S'ils sont présents en trop grande quantité, ces nouveaux composés font littéralement éclater les bulles de la mousse. Plusieurs raisons permettent d'expliquer ce phénomène : l'état nutritionnel du troupeau, le moment du cycle de lactation, les mauvaises conditions météorologiques ou encore la technique utilisée pour refroidir le lait cru à la ferme. À la maison, la lipolyse peut aussi se produire lorsque le lait est mal conservé. Il est donc important de toujours le conserver au réfrigérateur, à 4 °C (40 °F). D'ailleurs, un lait frais mousse souvent mieux qu'un lait conservé depuis plusieurs jours. En d'autres mots, lorsque le lait ne mousse pas, il n'y a rien à faire, sauf espérer que le litre de lait suivant donnera de meilleurs résultats !
La consistance : une question de matières grasses
Contrairement à celles de la crème à fouetter, les matières grasses présentent dans le lait ne participent pas à la formation de la mousse en tant que telle. En fait, tous les laits peuvent mousser, quelle que soit leur teneur en gras. Cependant, la consistance de la mousse formée sera très différente selon le type de lait utilisé.
- Le lait entier produit une mousse souple et moelleuse qui coule mieux à la surface du café, ce qui fait le bonheur des baristas qui pratiquent le latte art, la réalisation de dessins ou motifs sur la surface du cappuccino. Ce sont les globules de gras, présents dans les laits entiers et à 2 % m. g., qui donnent cette onctuosité à la mousse.
- Le lait écrémé, pour sa part, produit une mousse abondante, mais beaucoup plus ferme et rigide que celle du lait entier.
Expérience: Quel lait choisir?
Nous avons mis un lait entier et un lait écrémé à l'épreuve. Pour faire mousser le lait, on a utilisé un moussoir électrique (Aeroccino de Nespresso) dans les mêmes conditions. Des photos ont été prises quelques minutes après le moussage.
Notre constat ? Les deux types de lait donnent de très bons résultats et produisent un volume important de mousse, mais avec un léger avantage en faveur du lait écrémé. Les deux mousses sont aussi très stables, c'est-à-dire qu'elles ne disparaissent pas rapidement. Cette donnée est importante, car on aime bien que la mousse reste présente le temps de boire notre café. Là où les deux mousses se distinguent, c'est sur le plan de la souplesse et du goût. Au final, c'est une question de choix personnel. Notez que le lait 2 % offrirait un heureux compromis entre le volume et l'onctuosité.
Le lait entier
...produit une mousse un peu moins volumineuse, mais plus souple, moelleuse et dense que celle du lait écrémé. La mousse a un goût riche et crémeux fort agréable, et sa consistance se raffermit juste un peu en cours de dégustation.
Le lait écrémé
...produit davantage de mousse que le lait entier, avec des bulles un peu plus grosses, une consistance plus ferme et un goût neutre. En cours de dégustation, la mousse perd de son onctuosité et devient sèche et rigide.
Le lait additionné de calcium, lait sans lactose, Lait UHT, boisson d'amandes ou de soya… Ce ne sont pas les choix de laits ou de leurs substituts qui manquent. Mais qu'en est-il de leur efficacité dans un moussoir à lait ? Voici nos observations.
Les laits enrichis en calcium sont additionnés de substances laitières modifiées (dans ce cas, un concentré de minéraux laitiers et de protéines de lactosérum) qui augmentent leur teneur en calcium, mais aussi en protéines, au moins un peu. Ces laits moussent très bien et sont d'excellents choix pour ceux et celles qui cherchent à augmenter le calcium dans leur alimentation.
Le lait UHT (vendu en Tetra Pak comme celui de marque Grand Pré) est traité à une température très élevée, afin d'être stérilisé avant son empaquetage. Ce traitement de chaleur améliore les propriétés moussantes des protéines du lactosérum. Résultat ? Le lait produit une mousse plus abondante, plus ferme et qui dure plus longtemps que celle produite par les laits pasteurisés ordinaires.
Le lait sans lactose de marque Natrel contient un peu plus de protéines que les autres laits (11 g par tasse/250 ml contre 8-9 g dans les laits ordinaires et autres laits sans lactose) en raison du procédé utilisé par cette compagnie pour retirer le lactose du lait. Ces quelques grammes de plus aident à produire une mousse volumineuse, avec des bulles d'air très fines.
Les laits de brebis ou de chèvre contiennent des protéines similaires à celles du lait de vache et moussent parfaitement bien.
Les boissons de soya avec leurs 6-7 g de protéines par tasse (250 ml), produisent une mousse ferme, mais plus ou moins stable selon la marque. Certains fabricants offrent une boisson de soya spécialement conçue pour les bars à café, qui produit une mousse plus fine et plus stable. Une de ces boissons, le « mélange barista » du fabricant So Nice, est maintenant offerte en épicerie. Vérification faite, ce mélange donne de très bons résultats, mais sa mousse n'est pas différente de celle produite avec la boisson de soya ordinaire de la même marque.
Les boissons d'amandes avec seulement 2 g de protéines par tasse (250 ml), nous ont vraiment étonnés : dans le moussoir électrique, elles forment une belle mousse fine qui dure longtemps. Avis aux personnes allergiques au lait!
Les boissons laitières moussantes, comme celle de marque Nutrinor, produit tout nouveau sur le marché, sont spécialement conçues pour donner une mousse onctueuse et stable à chaque utilisation. Le secret de ces produits réside dans l'ajout de concentrés de petit lait et d'agents stabilisants, comme la carraghénine.